Les premiers changements concernant les allocations chômage sont appliqués depuis le 1er novembre. Les conditions d’accès sont modifiées, comme de nombreux autres paramètres. Voici ce qui a changé le 1er novembre.
2 décrets publiés durant l’été
Les partenaires sociaux n’ont pas réussi à trouver un terrain d’entente sur le dossier brûlant de l’assurance chômage cet hiver. Le gouvernement a donc repris le dossier de la réforme. Le but de l’État est d’accélérer le retour à l’emploi, que celui-ci soit durable et surtout, que l’Unédic (gestionnaire du régime) efface sa dette.
La réforme se réalise en deux temps. Les premières mesures sont en vigueur depuis le 1er novembre, le second volet s’appliquera le 1er avril. À la clé, l’État espère réaliser 3,4 milliards d’économies d’ici 2023.
Les syndicats en colère
L’annonce de la réforme de l’assurance chômage a fait grincer des dents du côté des syndicats. Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, estime que ces mesures génèreront des « drames » en enfonçant un peu plus certains chômeurs dans la précarité. En effet, d’après la réforme, un certain nombre d’entre eux pourraient voir leurs allocations largement réduites, voire supprimées. Une situation qui ne devrait pas aider les bénéficiaires d’après lui.
Les syndicats ne sont pas les seuls à désapprouver la réforme. En effet, directement concernée, l’Unédic estime également qu’elle aura un impact négatif sur 50 % des bénéficiaires.
Quelles sont les réformes applicables depuis le 1er novembre ?
Des conditions d’accès modifiées
Pour prétendre à l’allocation chômage, il faut désormais avoir travaillé au moins 6 mois (130 jours ou 910 heures) sur une période de référence de 2 ans, contre 4 sur les 28 derniers mois.
Toutefois, la période de référence reste inchangée pour les chômeurs de plus de 53 ans, en restant basée sur 28 mois. La durée minimale d’indemnisation passe donc de 4 à 6 mois, mais reste fixée à 2 ans pour les moins de 53 ans, 2,5 ans pour les 53-55 ans et 3 ans pour les chômeurs de plus de 55 ans.
Selon l’Unédic, pas moins de 710 000 personnes seront directement impactées la première année. 200 000 ne seront plus éligibles dès la première année et quelque 210 000 personnes pourront y prétendre 5 mois plus tard. En tout, 300 000 personnes verront leurs droits diminuer.
Le seuil des droits rechargeables allongé
Lorsqu’un chômeur travaillait durant l’ouverture de ses droits, ses indemnités étaient reportées d’autant de temps que le temps travaillé. Aujourd’hui, le seuil des droits rechargeables passe à 6 mois, soit la durée nécessaire pour avoir droit à l’indemnisation. En d’autres termes, le principe des droits rechargeables n’existe plus.
Pôle emploi a prévenu les allocataires concernés par un courrier envoyé à quelque 2 millions d’exemplaires. Ces droits rechargeables, mise en place en 2014, représentaient un quart des ouvertures de droits. Les premiers bénéficiaires n’étaient autres que les jeunes cumulant des petits emplois, enchaînant les CDD ou les missions d’intérim de courte durée. À noter qu’il s’agit souvent du même employeur qui propose une réembauche sur des petits contrats.
La conséquence majeure découlant de cette mesure devrait être l’augmentation de bénéficiaires de l’Allocation de solidarité spécifique (ASS), versée aux chômeurs en fin de droits. L’enveloppe prévue à cet effet a d’ailleurs été augmentée dans le budget 2020.
Des allocations dégressives pour les hauts revenus
Dans le but de favoriser une « égalité sociale », le gouvernement entend instaurer un système d’allocations dégressif. À compter du 7e mois de chômage, celles-ci chuteront de 30 % pour les sans-emplois dont le salaire est supérieur à 4 500 euros bruts (environ 3 500 nets). Le plancher à 2 261 euros net est toutefois maintenu. Les premiers concernés verront donc leurs allocations chômage baisser dès le mois de juin 2020. D’après l’Unédic, 4 % des allocataires seront concernés.
Bon à savoir : Les chômeurs de plus de 57 ans ne seront pas concernés par cette mesure et le plafond de l’indemnisation maximale restera à 6 615 euros nets.
Des droits ouverts pour les indépendants et les démissionnaires ayant un projet professionnel de reconversion
Les salariés démissionnaires ayant travaillé au moins 5 ans consécutifs dans la même entreprise et ayant un projet professionnel de reconversion en vue ou un projet de création/reprise d’entreprise pourront, sous certaines conditions, prétendre à une indemnisation de la part de Pôle Emploi.
Pour ce faire, ils devront, avant de démissionner, demander un conseil en évolution professionnelle (CEP), puis faire valoir le caractère réel et sérieux de leur projet par une commission paritaire (syndicats/patronats). Cette dernière sera chargée de vérifier la fiabilité du projet (perspectives d’emploi, pertinence de la formation identifiée, besoins de financement, moyens techniques et humains envisagés, etc.). Ce n’est qu’une fois l’attestation obtenue de la part de la commission, que le salarié pourra déposer sa démission. Il aura alors 6 mois pour effectuer une demande d’allocations à Pôle emploi. L’organisme sera à son tour en charge de vérifier la mise en œuvre réelle du projet.
Il s’agit d’une mesure largement attendue par les principaux intéressés. En effet, déjà votée l’an dernier dans la loi « Avenir professionnel », elle pourrait être versée à quelque 17 000, voire 30 000 futurs salariés démissionnaires.
De leur côté, les indépendants percevront une allocation forfaitaire de 800 euros par mois pendant 6 mois en cas de liquidation judiciaire. Pour y prétendre, leur activité précédente devra avoir généré un revenu minimum de 10 000 euros par an sur les 24 derniers mois avant la liquidation.
Les changements prévus en avril 2020
Au mois d’avril, d’autres mesures se mettront en place. Le mode de calcul des indemnités chômage sera effectif sur le revenu mensuel du travail et non plus sur le nombre d’heures.
La plupart des autres mesures concerneront environ 4 allocataires sur 10 et principalement les jeunes en fin de CDD ou en fin de mission intérim. Toujours dans l’optique de pérenniser les emplois et non de favoriser l’alternance entre petits jobs et chômage, l’État souhaite mettre un coup de frein sur le « cumul emploi chômage ». Cumuler un petit salaire avec l’allocation chômage ne sera plus automatique. « C’est pas un but à vie, pour personne, d’être à l’assurance chômage, c’est pas un métier. Quand le marché est dynamique, il faut aussi retourner à l’emploi » insiste Muriel Pénicaud, ministre du Travail. Une élocution à laquelle Force ouvrière répond que « la précarité n’est pas non plus un métier. »
Afin que tous les acteurs du marché jouent le jeu, un système de « bonus-malus » sera mis en place pour éviter que les entreprises abusent des contrats courts. 7 secteurs seront directement concernés. De même, les cotisations patronales seront modulées entre 3 et 5,05 % en fonction du nombre de contrats supprimés. Cette mesure doit entrer en vigueur en 2021.