En mettant en circulation des voitures radars pour contrôler la vitesse des automobilistes, l’État veut faire chuter le nombre de morts sur les routes, la vitesse étant le premier facteur de mortalité. Toutefois, les associations d’automobilistes y voient plutôt l’occasion de faire rentrer rapidement de l’argent dans les caisses. Le point sur la situation.
383 véhicules radars en circulation d’ici 2020
« Le système va commencer à fonctionner lundi 23 avril sur les routes de l’Eure avec 5 véhicules qui vont commencer à flasher », a expliqué Emmanuel Barbe, délégué interministériel à la sécurité routière lors d’une conférence de presse.
Le dispositif sera ensuite déployé en Normandie, normalement avant l’été 2018, avec 26 voitures prévues, puis étendu progressivement à toute la France. D’ici 2020 ce sont « 383 véhicules [qui devraient être] opérationnels ».
Les voitures radars actuellement déployées dans l’Eure sont des Peugeot 308, mais la Sécurité routière a déjà fait savoir que les prochaines seront de différents types, les rendant impossibles à repérer (Renault Mégane, Peugeot 308, Citroen Berlingo et Dacia Sandero). Ces véhicules ne « flashent » pas vraiment, car ils sont équipés d’infrarouge sur les plages avant et arrière qui permettent de contrôler la vitesse dans les deux sens de circulation.
Les voitures radars pilotées par des entreprises privées
Pour le moment, ces véhicules roulaient avec deux gendarmes ou policiers à bord. Depuis lundi, il n’y a qu’un seul conducteur en tenue civile dans l’habitacle des voitures radars. Leur pilotage est transféré à des sociétés privées tandis que l’État en restera propriétaire.
Ceci pour « augmenter la capacité de flasher », a expliqué Emmanuel Barbe. Les sociétés privées ont en effet pour mission de faire circuler ces voitures 8 heures par jour, tous les jours, même les jours fériés et la nuit, alors qu’actuellement, avec les forces de l’ordre, ces voitures ne roulent en moyenne que 1 h 30 par jour.
Il n’y a pas d’objectif chiffré pour le nombre de flashs ou d’amende délivrés. La rémunération de l’entreprise privée est évaluée uniquement en fonction du nombre de kilomètres parcourus.
Un dispositif très rentable
En faisant rouler les voitures radars 8 heures par jour, le nombre de flashs pourrait théoriquement passer de 2 millions (chiffres actuels) à 12 millions par an en France. Ceci représente une augmentation potentielle de 500 % de la rentabilité. Ce calcul ne prend pas en compte la hausse du nombre de PV prévus avec l’abaissement de la vitesse à 80 km/h sur les routes secondaires ni l’ajout des voitures de gendarmerie ou de police à celles qui seront transférées dans le privé.
Cette hausse de rentabilité inquiète les associations d’automobilistes. Car même si en effet, la vitesse excessive est la première cause de mortalité sur les routes, elles souhaiteraient que l’État ne se focalise pas seulement sur le porte-monnaie des conducteurs, mais qu’il s’occupe également de rénover et d’améliorer les infrastructures, par exemple en installant plus de glissières de sécurité pour les motards.
« Faute d’investissement, nous sommes arrivés au niveau national, sur l’ensemble du réseau, à un seuil d’à peine 45 % de routes en bon état », a expliqué Pierre Chasseray, délégué national de l’association 40 millions d’automobilistes.
Emmanuel Barbe, au micro d’Europe 1, se défend quant à lui d’uniquement rechercher un moyen pour remplir les caisses de l’État. Les radars mobiles privés « flashent les excès de vitesse significatifs (...) On n’a qu’un seul objectif chiffré, c’est de faire baisser le nombre de morts et de blessés graves sur la route ».