La CNIL alerte sur les risques liés aux montres connectées pour enfants
Les montres connectées ne sont plus réservées aux adultes. En effet, depuis quelques années, des marques proposent des produits spécifiques pour les enfants. Si elles peuvent s’avérer très efficaces et pratiques dans certains cas, elles ne sont pas moins intrusives dans la vie privée des enfants. Un fait qui n’est légalement pas acceptable. Explications.
Les montres connectées pour enfants qu’est-ce que c’est ?
Sur le même modèle que les montres connectées pour adultes, les exemplaires pour enfants ont sensiblement les mêmes fonctionnalités et représentent désormais plus de la moitié du marché mondial. Très tendance, elles rassurent les parents, tout en devenant un objet incontournable chez les jeunes.
Mais que peut-on faire avec une montre connectée ? En réalité, en plus de pouvoir lire l’heure, la montre connectée pour enfants est dotée d’une carte SIM intégrée, leur permettant aussi de :
- Communiquer par l’envoi et réception de SMS, réception et émission d’appels, envoi de SOS…
- Signaler leur emplacement par un système de géolocalisation précis et en temps réel, permettant d’envoyer une alerte aux parents si l’enfant s’éloigne du trajet déterminé
- Connaître leur état de santé en temps réel (rythme cardiaque)
- Encourager la mobilité via un traceur compteur de nombre de pas
- Divertir par le biais d’applications semblables à celles des mobiles : photos, météo, jeux…
En d’autres termes, les enfants possédant une montre connectée peuvent aisément se passer de smartphone. Il s’agit d’une alternative idéale pour les établissements interdisant les téléphones portables dans leur enceinte.
Toutefois, il est bon de rappeler que depuis la loi du 3 août 2018, l’utilisation d’un smartphone est interdite dans les écoles (maternelles et élémentaires), ainsi que dans les collèges, sauf cas particulier. Cette interdiction s’étend également à tout autre dispositif dit connecté, dont les montres dès lors que celles-ci disposent des mêmes fonctionnalités qu’un téléphone portable (carte SIM, connexion au WiFi, appels téléphoniques…).
La montre connectée est-elle si inoffensive qu’elle y paraît ?
Certes, la montre connectée semble être une excellente idée cadeau pour un adolescent, surtout pour rassurer les parents. Elle leur permet de toujours rester en contact avec leur enfant, qui lui, est en pleine quête d’autonomie. Cependant, elle présente aussi des inconvénients majeurs. La CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) a d’ailleurs alerté les parents sur les problématiques liées tant au développement qu’à la vie privée de l’enfant possédant un tel dispositif.
En effet, caché derrière une montre connectée, un enfant peut aussi :
- Devenir plus dépendant et freiner son rapport aux risques, notamment sur le fait d’anticiper un danger et d’y faire face, etc.
- Se servir de la montre dans des moments inopportuns (examens, cours…)
- Briser les liens sociaux en se renfermant sur lui-même et sa montre lors des récréations ou durant des moments de partage
- Couper toute communication avec les parents sous prétexte que la montre connectée leur donne déjà toutes les informations nécessaires
- Se montrer méfiant et/ou développer de la culpabilité envers ses parents (« si tu refuses que je connaisse tes trajets, c’est que tu as quelque chose à te reprocher »)
Un enfant, au même titre qu’un adulte, a droit à sa vie privée. L’éducation donnée par les parents permet aux jeunes de connaître les limites de leurs actions. La montre connectée ne doit être qu’un indicateur et non un moyen pour les parents, de faire intrusion dans la vie privée de leur enfant.
Comment réagir pour minimiser les impacts dans la vie privée d’un enfant en possession d’une montre connectée ?
En fonction de l’âge, toutes les fonctionnalités d’une montre connectée ne sont pas forcément nécessaires. De plus, ces accessoires peuvent aussi être piratés, au même titre que les smartphones ou tout autre appareil connecté. La collecte des données non seulement des enfants, mais par ricochet, aussi des parents, est un fait bien réel. Il est donc bon de mesurer les besoins et d’utiliser de tels produits avec modération.
La géolocalisation fait partie des options les plus appréciées des parents. Or, elle est aussi très intrusive pour les adolescents. En fonction de l’âge de l’enfant, il est bon de désactiver cette option et de privilégier la confiance et le dialogue avec lui. Faire confiance à son enfant, c’est aussi avoir confiance en l’éducation qu’il a reçue et donc, celle que ses parents lui ont donnée.
Communiquer avec son enfant via sa montre connectée est aussi très pratique. Mais il s’agit d’une méthode peu fiable et facilement détournable par les hackers. En d’autres termes, un téléphone portable, même sommaire pourrait être plus pratique et surtout, plus sûr.
Enfin, si l’enfant se sert de sa montre connectée uniquement à des fins sportives, un simple podomètre devrait être tout aussi efficace, effaçant ainsi tous les risques liés aux montres connectées.
La CNIL met en garde sur la vie privée des enfants
En 2011, les CNIL européennes ont rendu public un avis unanime dans lequel elles précisent qu’« il ne devrait jamais arriver que, pour des raisons de sécurité, les enfants soient confrontés à une surveillance excessive limitant leur autonomie. » Cela concerne également l’entourage, et donc, les parents.
Si, pour des raisons très particulières, les parents estiment qu’il est nécessaire pour eux de s’immiscer dans la vie privée de leurs enfants, alors, ces derniers doivent être mis au courant et doivent avoir le droit de pouvoir donner leur avis quant à l’utilisation de moyens permettant de connaître leur position, communiquer, etc.
Quelles sont les précautions à prendre avant d’acheter une montre connectée à un enfant ?
L’information et le conseil restent les deux maîtres mots à exploiter avant d’acheter une montre connectée à son enfant. En effet, les produits à bas coût doivent mettre la puce à l’oreille. Généralement, leurs méthodes de sécurité sont faibles, permettant à n’importe quel hacker de s’emparer des données collectées par l’objet.
Toujours vérifier que le produit dispose d’une notice explicative en français. Cela permet entre autres de savoir quels types de données sont collectées, lesquelles sont commercialisées, etc. De même, il est important de savoir où ces données sont hébergées. En Europe, elles sont soumises aux lois européennes (dont la RGPD), en revanche, s’il s’agit d’un hébergement hors UE, ces conditions de protection de données n’existent pas. En 2019, un certain nombre de montres connectées se sont vues rappelées suite à un défaut dans la sécurité de stockage de données sur des serveurs distants…
Il est également primordial d’avoir un contact (mail ou téléphonique) pour pouvoir poser des questions ou exercer ses droits sur les données collectées. Les meilleurs produits sont aussi ceux sur lesquels il est possible de déconnecter une fonctionnalité (géolocalisation, communications…), protéger les accès grâce à un mot de passe, voire un mode d’authentification complémentaire.
Le mieux reste donc de procéder à un achat physique pour pouvoir questionner le vendeur. Dans la mesure du possible, il est bon de pouvoir tester l’appareil dans le magasin avant de l’acquérir. Faire ses recherches sur internet pour connaître les avis et les risques sur le produit convoité est également de rigueur.